Zappos est une plateforme américaine de e-commerce basée à Las Vegas. Elle est l’une des plus grandes entreprises qui adopte l’holacratie : un mode organisationnel qui déconstruit la pyramide hiérarchique pour laisser plus d’autonomie aux salariés. C’est en avril 2015 que le dirigeant de cette société, Tony Hsieh, décide de congédier tous les managers de leurs postes afin de réorganiser la dynamique structurelle de l’entreprise. Mais suite à un certain dysfonctionnement, nous vous expliquions que l’entreprise avait finalement décidé de faire machine arrière et d’abandonner finalement ce mode de gouvernance. En réalité, il semblerait que l’entreprise n’ait pas définitivement abandonné cette pratique mais l’aurait plutôt adaptée. Zoom sur l’holacratie vue par Zappos !
Une Holacratie personnalisée chez Zappos
À la suite des articles qui sont apparus dans les journaux et des débats que ce changement organisationnel chez Zappos a provoqué dans les médias, un des Product Manager de l’entreprise s’est empressé de rédiger, en septembre 2015, un article sur Zapposinsights pour expliciter ce qu’impliquerait leur décision. En quelques lignes, il reprend les malentendus et les rumeurs pour éclaircir la véritable transition managériale qui a eu lieu.
Si les managers de la firme leur avaient été jusque là d’une grande valeur et ont contribué à leur succès, il était temps pour Zappos de repenser une façon d’aller plus loin, plus vite, tout en visant l’épanouissement de ses collaborateurs. Ainsi, la hiérarchie ne fut pas totalement supprimée, mais plutôt refondée : c’est une pyramide de travail qui est venue remplacer la pyramide de gestion qui, selon les fonctions rigides des employés, déterminait jusque-là ceux qui étaient “hauts placés” et leurs collègues.
De cette manière le leadership n’est pas aboli. Il est réorganisé en fonction des rôles que les collaborateurs se départagent selon les projets et les compétences exigées pour leur réussite. Un système flexible qui privilégie la fluidité des équipes, la création d’opportunités plus équitablement réparties, la naissance d’idées innovantes, et une meilleure efficacité.
Découvrez le mail que Tony Hsieh a envoyé à ses employés en 2015, suite à cette prise de décision.
Holacratie : en a-t-on une fausse idée ?
C’est en tout cas ce que pense le PDG de Zappos, Tony Hsieh. Pour lui, quatre points essentiels expliquent la philosophie de ce système holacratique. Ou du moins, celle de Zappos.
Holacratie : il ne s’agit pas que d’un consensus
L’holacratie fonctionne avec un ensemble imbriqué de structures, de processus et de pratiques, les collaborateurs ne sont pas laissés face à eux-mêmes. Au contraire, leur mission est de relever des défis collectifs. Les rôles circulent et sont échangés de manière fluide. L’autorité est distribuée entre les membres. Les décisions sont prises par tout le monde dans le sens où chacun a le droit de ne pas être d’accord. Tout le monde est en mesure d’innover. Des réunions sont tenues quand elles sont nécessaires. Les groupes de travail temporaire sont créés spontanément et rapidement dissous à nouveau.
L’holacratie ne résout pas la question de l’inégalité de pouvoir
D’ailleurs, ce système dépasse de loin la question d’inégalité. Il faut convertir le pouvoir en puissance.Tony Hsieh explique que : “ la puissance n’est pas considérée comme un jeu où le pouvoir que j’ai est nécessairement le pouvoir qui vous est retiré. Au contraire, si nous reconnaissons que nous sommes tous interconnectés, plus vous êtes puissant, plus je peux devenir puissant. Plus vous avancerez puissamment le but de l’organisation, plus les opportunités s’ouvriront pour que je fasse moi-même des contributions”.
Alors, sans une hiérarchie du pouvoir qui suggère de la domination, tous les collaborateurs pourraient devenir la version la plus forte et la plus saine d’eux-mêmes. Des hiérarchies naturelles et non “plates” apparaissent (de développement, de compétences, de talents, d’expertises), qui sont tout le temps en rotation.
Avec la liberté qu’octroie l’holacratie, vient la responsabilité
Les collaborateurs ont besoin de grandir et d’assumer l’entière responsabilité de leurs pensées et de leurs actions, ce qui peut être difficile, surtout en début de carrière. Mais cela n’est pas inné : ça s’apprend, ça se construit.
“Il semble important d’au moins essayer de penser en dehors de la pyramide, de tenter de réparer les conséquences malsaines de l’inégalité de pouvoir avec un leadership plus éclairé. Nous pouvons réinventer les structures et les pratiques de base des organisations pour autonomiser les collaborateurs”, ajoute Tony Hsieh.
L’holacratie n’est pas une pratique nouvelle
Non, l’holacratie n’est pas en cours d’expérimentation car l’autogestion a déjà fait ses preuves : les entreprises Gore-Tex et Whole Foods pratiquent déjà depuis longtemps ce système de gouvernance et les résultats, notamment en matière de chiffre d’affaires, attestent de son succès.
Dans d’autres domaines, il est aussi possible de citer The Orpheus Chamber Orchestra qui est aujourd’hui considéré comme l’un des plus grands orchestres du monde. Même les grandes organisations basées sur le volontariat comme Wikipedia ou encore Alcoholics Anonymous ont prouvé l’efficacité de ce système.
Enfin, lorsque les collaborateurs ont été notifiés du changement, des indemnités ont été garanties à tous ceux qui ne souhaitaient pas poursuivre cette organisation. 14% ont donc fait leurs bagages pour quitter l’entreprise. Sans grande surprise pour le PDG de l’entreprise pour qui, cette décision paraissait plus que normal : l’autogestion et l’auto-organisation peuvent ne pas convenir à tout le monde, et nombreux sont ceux ne veulent pas aller dans cette direction.
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Auteur(s)
- Margaretta El Khoury
Passionnée par les innovations managériales et les éternelles révolutions du monde du travail, j'accompagne les sociétés dans l'évolution de leurs organisations et leurs pratiques. Bref, Tocqueville le jour, Hemingway la nuit !