L’évolution du phénomène du bonheur au travail a vécu un puissant crescendo au cours des dernières années jusqu’à arriver, dans certaines sociétés, à la création de postes de « Happiness Managers » ou même de « Chief Happiness Officers ». La question qui se pose est : que reste-il du bonheur au travail si nous allons au-delà des paniers de fruit et du baby-foot ?
Cerise sur le gâteau ou plat principal ?
Avec un marché du travail toujours plus concurrentiel, et une explosion des sites d’avis de salariés sur lesquels les potentiels candidats peuvent avoir une vision de la culture de n’importe quelle entreprise, il est naturel que la notion de bonheur au travail prenne de l’importance.
Les entreprises, en particulier celles dans le secteur de la technologie, deviennent de plus en plus connues pour les incroyables avantages qu’ils incluent dans leur comp & ben. De la nourriture, en passant par les cours et les gymnases, à des domaines beaucoup plus larges tels que les conférences avec des remarquables leaders d’opinion. Mais, est-ce-que le « bonheur » n’est pas seulement la cerise sur le gâteau plutôt que le plat principal ?
Je dirais que la réponse est : ça dépend.
Dans de nombreuses entreprises, le « bonheur au travail » signifie simplement créer une bonne ambiance au travail, un environnement amusant. On ne peut nier que de beaux avantages et une atmosphère de travail amusante ont un impact sur son bonheur. Il ne faut pas les sous-estimer. En effet, dans la fameuse « guerre des talents » du XXIe siècle, les avantages représentent même le « socle minimal » pour toute entreprise qui cherche à être attractive.
Pour de nombreuses entreprises à forte croissance, limitées par le temps et les ressources, centrées sur la croissance spectaculaire à court terme et le recrutement en masse plutôt que sur la longévité, il n’est probablement pas surprenant que le « bonheur » ne dépasse pas cette couche superficielle.
Du bonheur au bien-être, à la satisfaction et au-delà
Néanmoins, certaines entreprises parviennent à dépasser le sommet de l’iceberg et à rendre plus significative la fonction de bonheur. Ces entreprises accordent une attention particulière à des aspects plus profonds tels que la formation et le développement, l’évolution de carrière, la santé et la sécurité, l’égalité et la diversité, la qualité de vie et l’équilibre vie pro – vie perso. Ces entreprises sont encore rares : une étude de Thomson Reuters a révélé que si ces aspects étaient les critères étudiés, seulement 1 entreprise sur 10 pourrait être considérée un « Great Place to Work ». Cependant, comme l’a souligné Krapivin (2018), ces entreprises récupèrent tous leurs investissements vu qu’il existe une corrélation évidente entre ces facteurs et la rentabilité. Les entreprises où le bonheur regroupe des questions plus « profondes » comme le bien-être, la satisfaction et la progression au travail sont tout simplement plus efficaces et plus rentables.
Au-delà du sommet de l’iceberg : s’éloigner de l’acquisition de talents
Lorsque nous examinons les facteurs dans lesquels excellent les entreprises « heureuses » les plus performantes, il ressort clairement qu’ils sont principalement liés à un investissement à long terme dans les employés. Des investissements dans les domaines de la formation et du développement, de la santé et de la sécurité, de l’égalité et de la diversité, de l’équilibre vie pro – vie perso ont une vision à long terme. Ils sont peu liés à la création de « moments de bonheur » comme peuvent le faire une refonte de bureaux, de la nourriture gratuite et l’aménagement de salles de sport, mais plutôt au bien-être et à la satisfaction longue durée des collaborateurs.
Il semble tout à fait logique qu’un employé puisse rester dans l’entreprise au cours de la première année pour les avantages offerts, mais il y a de grandes chances qu’il y reste deux, trois, quatre ans voire plus s’il continue à apprendre, à grandir et à profiter d’une vie saine et épanouissante au travail et en dehors.
DIAGRAMME : L’iceberg « bonheur ». Dans les entreprises les plus performantes, l’avantage « bonheur » est au sommet de la pyramide. Mais il est soutenu par des stratégies plus profondes liées aux employés telles que le bien-être et la satisfaction à long-terme de l’employé.
Le pivot crucial des entreprises serait donc de passer du « bonheur » comme élément essentiel de l’acquisition de talents, à un élément essentiel de la rétention durable des talents, et donc à terme, de la rentabilité et la durabilité des entreprises. Cela signifie que le « bonheur » qui est au sommet de l’iceberg doit être soutenu par des stratégies de bonheur plus profondes et plus long terme.
Sinon, le bonheur au travail continuera de ressembler à un dessert sucré : délicieux au départ mais ni satisfaisant ni sain à long terme pour les employés et les employeurs.
Auteur(s)
- Grace McKelvey
Talent Acquisition Lead, EMEA at Botify. Ma passion pour les langues et la linguistique m'a amenée en France où j'ai découvert et suis tombée amoureuse du recrutement. Aujourd'hui, j'ai la chance de rencontrer des gens formidables tous les jours et d'avoir un impact sur l'avenir du Search Marketing.